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Tribune : Étudiants et étudiantes afghanes : En finir avec les politiques d’hostilité

jeudi 30 septembre 2021

Étudiants et étudiantes afghanes : En finir avec les politiques d’hostilité

Le 15 août 2021, sous le regard sidéré de la communauté internationale, les Talibans prenaient le contrôle de Kaboul, capitale de l’Afghanistan et siège d’une université quasi centenaire, cible répétée d’attentats meurtriers au cours des dernières années. La menace sur la sécurité et la liberté des afghans, et en particulier des femmes afghanes, nous a saisis d’effroi. C’est donc avec une attention inquiète, que nous, membres de la communauté étudiante et universitaire, avons lu la lettre écrite par la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation aux chefs d’établissement le 23 août 2021. Nous espérions une prise de position à la hauteur de la catastrophe – à la hauteur aussi de l’espérance de nos camarades et collègues, étudiant·es, enseignant·es, chercheur·es, professeur·es, qui ont fui, fuient aujourd’hui et continueront de fuir le nouveau régime en place en Afghanistan, solidaire enfin de tous ceux et toutes celles qui traversent les frontières pour espérer trouver en France un lieu de refuge et d’épanouissement, d’exercice de leur libre conscience et de leurs capacités critiques.

Mais tout ce que le Ministère propose, c’est un bricolage improvisé dans l’urgence, un appel vide de tout moyen, sans considération aucune pour les étudiants afghans et les étudiantes afghanes d’ores et déjà présentes sur le territoire et maltraitées par l’institution universitaire. Dans sa lettre aux chefs d’établissement, Frédérique Vidal enjoint à « faciliter les inscriptions, mettre en place des solutions d’accueil et d’hébergement » pour les étudiants afghans. Or, si les exilés afghans sont empêchés d’accéder à l’enseignement supérieur, c’est d’abord à cause du coût des études. Car la malnommée “Bienvenue en France”, cette réforme portée en 2018 par le cabinet Vidal, a érigé un mur d’argent entre les étranger·es non-communautaires et l’université. Une personne fuyant les balles des talibans doit ainsi payer à son arrivée en France 2770€ pour entrer en licence, 3770€ pour entrer en Master. Un soutien réel à ces étudiant·es exige la suppression pure et simple de Bienvenue en France, cette machine à sélection par l’argent, ainsi que de toutes les politiques d’hostilité qui ont rendu la vie des étudiant·es étranger·es invivable. L’arbitraire des délivrances de visa, l’introduction d’un délai de carence à la Sécurité sociale, la difficulté de renouvellement des titres de séjour en préfecture, les conditions de ressources exorbitantes ou la limitation du droit au travail des étudiant·e·s sont autant de freins au droit aux études qui vont contre les valeurs les plus élémentaires de la communauté universitaire et étudiante.

Frédérique Vidal exhorte les chefs d’établissements à se tourner vers les CROUS pour y trouver à la va-vite des logements vides pour les étudiant·es afghan·es. Or, le problème est structurel : aucun dispositif de soutien n’est actuellement prévu par les CROUS pour accompagner les étudiant·es en demande d’asile, et les résidences étudiantes sont largement saturées.

Enfin, Frédérique Vidal souhaite “mobiliser tous [les] leviers pour venir en aide avec toute la force nécessaire aux afghans”. Or depuis l’été 2015, les établissements se sont mobilisés pour accueillir les personnes exilées en reprise d’études : des dizaines de programmes et d’associations étudiantes ont su, à partir du drame syrien, mettre en place des dispositifs égalitaires et efficaces de soutien et d’apprentissage du français pour les personnes exilées. Mais ces initiatives souffrent d’un manque chronique de financement, de personnel et de soutien institutionnel. Les Diplômes Universitaires Passerelles, ces programmes mêlant cours de français et méthodologie universitaire, ont trois fois moins de places qu’il n’y a de candidat·es éligibles. Au-delà des jeux de communication, il faut investir dans le système universitaire, depuis trop longtemps délaissé et appauvri par les réformes successives, et pérenniser les initiatives d’accueil établies depuis 2015.
Si les réfugié·es arrivent à poursuivre leurs études aujourd’hui, ce n’est donc pas grâce au Ministère de Frédérique Vidal, mais contre les obstacles qu’il a dressés sur leur chemin. Les étudiant·es afghan·es, comme ceux issus d’autres pays, sont déjà présent·es, se battent pour étudier et pour survivre dans la dignité, et elles et ils continueront d’arriver. Le bricolage insatisfaisant proposé par Madame Vidal est indigne des luttes et des espoirs de tous les réfugié·es, et pas seulement de celles et ceux qui viennent d’Afghanistan - on oublie aujourd’hui les autres comme on oubliait les Afghan·es au moment de la “crise syrienne”. Contre cette politique inégalitaire et incohérente de l’urgence médiatique, l’effectivité de la protection repose sur l’octroi de visas pour toutes les personnes nécessitant une protection, sur la simplification des procédures de réunification familiale, sur des programmes universitaires conçus pour toutes et tous les exilés. A défaut, nous resterons impuissants devant toutes les crises futures qui ne manqueront pas de nous sidérer et en appelleront à nouveau à notre responsabilité.

Au-delà du monde universitaire, à toutes celles et ceux qui arrivent en France pour y vivre et y trouver la sécurité, un droit à l’éducation, à la formation et à la dignité doit être garanti. Trop souvent, nous nous résignons devant l’hostilité à l’égard des étranger·es, au point de ne plus lutter pour assurer inconditionnellement des cours de français dès l’arrivée sur le territoire ; au point de ne plus défendre leur droit au travail, à la formation et à l’apprentissage ; de ne même plus protester collectivement devant le spectacle écoeurant des lacérations de tentes et du déni de droits dans les campements où survivent les exilés afghans et tant d’autres.
A l’université comme ailleurs, il est temps d’en finir avec les politiques d’hostilité.

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