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Inserm : le délire de la bibliométrie

lundi 17 juin 2019

Inserm : le délire de la bibliométrie

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Pour nos gouvernants, les chercheurs ne doivent plus se contenter d’être des scientifiques, il leur faut être économiquement rentables en valorisant le produit de leur recherche sur le marché des connaissances. Les chercheurs ont un gros défaut, ils sont trop tournés vers la science et pas assez vers l’entreprise. Qu’à cela ne tienne, en effondrant les crédits récurrents et en mettant en place un système de financements contractualisés, on les a obligés à travailler sur des thèmes bien définis. Mais, cela n’était pas suffisant. Il fallait leur inculquer la logique de l’entreprise, celle de la culture managériale afin de les transformer selon le vœu de Mme Vidal en chercheurs entrepreneurs. Les chercheurs doivent avant tout devenir des managers, ils doivent savoir trouver des financements et gérer du personnel. Et pour que tout le monde marche dans le même sens, chaque organisme national de recherche est lié à son ministère de tutelle par un « contrat d’objectifs et de performance ». Qui dit objectifs dit recherche finalisée, qui dit performance dit compétition pour atteindre ces objectifs. Si la performance a un sens en matière sportive ou commerciale, elle est antinomique de la démarche scientifique.

L’actualité démontre à quelles dérives et pratiques aboutit le culte de la performance dans le domaine du sport comme de la compétition commerciale. Dans la recherche, la performance est synonyme de perte de l’éthique professionnelle, avec son cortège de publications de résultats insuffisamment vérifiés, si ce n’est de faux et d’inévitables rétractations.

La tyrannie des indicateurs

La culture de l’entreprise privée s’est accompagnée d’une transformation de l’évaluation. De qualitative, elle est devenue essentiellement quantitative. Les chercheurs, les laboratoires sont maintenant soumis à la tyrannie des indicateurs.
La bibliométrie a été détournée de sa vocation première qui était de proposer un outil de repérage bibliographique pour les chercheurs d’un même domaine pour devenir un outil de normalisation scientifique.

Sous prétexte d’aide à la décision, la Direction de l’Inserm cherche à imposer la lecture de ses indicateurs en lieu et place de l’évaluation c’est à dire de l’analyse de la pertinence de la démarche scientifique.

Les unités en évaluation ont reçu du Département de l’évaluation et du suivi des programmes (DESP) l’analyse bibliométrique de leurs 5 dernières années. Les explications des différents indicateurs utilisés sont disponibles sur le site http://extranet.inserm.fr/bibliometrie à la rubrique « les indicateurs bibliométrique ».

Les indicateurs bibliométriques de chaque équipe de l’unité en évaluation sont comparés avec ceux de la même vague d’évaluation de l’HCERES. Ce qui donne une représentation 3D intitulée de l’excellence de publication des équipes avec en ordonnée la notoriété versus en abscisse la visibilité suivie d’une seconde représentation 3D intitulée de l’excellence des publications des équipes en position majeure. Dans ce dernier graphe est pris en compte la place des signataires. La production de chaque équipe est ainsi située par rapport à une médiane de visibilité et de notoriété des journaux !

La production de l’unité est disséquée en analysant par équipe et par agents (chercheurs, EC, PU, PUPH, MCUPH, Post doc) le nombre de publications, le nombre de publications (PDC) pour laquelle au moins un chercheurs de l’équipe est premier, dernier auteur, corresponding auteur, l’indice de position moyen, la visibilité des travaux (indice de citation normé, les publications TOP 10% de citations), la notoriété des journaux (Impact facteur normé moyen, les publications dans des journaux à IF Top 5) et …l’excellence (Nombre de publications (PDC) dans des journaux généralistes et des journaux de spécialités.

Suit ensuite une liste de disciplines avec pour chacune d’elle le seuil de facteur d’impact pour qu’un journal fasse partie des journaux impact Top5. Ainsi qu’une liste de journaux de spécialité dits de forte notoriété (journaux facteur d’impact 1%). Or, c’est de cette liste TOP1 que découle toute l’analyse du DESP (liste de journaux de spécialité dont le facteur d’impact est gonflé par le lectorat et la publication d’articles médicaux, d’où le biais des indicateurs choisis par l’Inserm). Ce qui aboutit à une liste très contestable pour la rigueur de l’analyse qui en découle. Les journaux généralistes 1% sont reconnus refléter la qualité scientifique, mais avons-nous besoin du DESP pour le confirmer ?

Mais le DESP, trouve le moyen de dévoyer cet élément incontestable en prenant en compte le fameux PDC ! On pousse soi-disant les chercheurs à collaborer et à permettre l’émergence des plus jeunes, etc… mais tout en se gardant les premières ou dernières places dans les papiers… en l’absence de PDC les co-auteurs dans les journaux TOP1 ou 10% ne sont plus comptabilisés. Ce qui nous amène à la situation suivante : avoir publié un seul papier et en PDC dans un TOP1 ou 10 place le chercheur dans une position plus remarquable que celui qui aurait AUSSI publié dans des journaux n’appartenant pas cette liste que ce soit en PDC ou pas.
Comme le facteur d’impact est fonction du lectorat, on ne s’étonnera pas que les revues fondamentales correspondant à des disciplines restreintes n’y figurent pas. En évinçant ces revues par la tyrannie du facteur d’impact la Direction de l’Inserm oriente les recherches vers des thèmes finalisés.

Le blabla technocratique

Ce document produit par le DESP est consternant.

Il n’y a plus besoin de comité de visite, il suffit de rentrer dans un logiciel les revues, titres et auteurs des publications. Tout cela est compilé dans des tableaux et comparé aux indicateurs qui auront été préréglés.

Le facteur d’impact comme mesure de la productivité des chercheurs, quelle avancée ! il n’y a plus besoin de lire le contenu des publications et encore moins les rapports d’activité ! Que de temps gagné, que d’économies réalisées !

Afin d’établir de façon scientifique, l’utilité sociale du chercheur et de son laboratoire, nous suggérons de pondérer le facteur d’impact par le chiffre d’affaire obtenu grâce aux brevets déposés et aux contrats de licence. Cela étofferait un peu plus le baratin technocratique du DESP dont les commentaires sont transcendants.
« x articles sont parus dans des journaux de spécialité de forte notoriété, soit moins de y % des articles du projet d’unité. z de ces article sont signés par au moins un membre de la future unité en position majeure (PDC). w articles parus dans ces journaux se positionnent au Top10% et parmi eux z se positionnent au Top 1% ». Oui et alors ! La Figure 2 montre que les publications originales des équipes XXX et YYY du projet d’unité se répartissent au-dessus des médianes de visibilité et de notoriété des journaux. Seule l’équipe dirigée par ZZZ montre une visibilité en dessous de la médiane »

Oh, ZZZ quel nul il publie en dessous de la médiane ! Shame of him ! Mais comment savoir que l’on publie sous la médiane ?

Le DESP va encore plus loin dans le langage abscons !

« Les co-signatures des publications permettent d’identifier les liens entre les différents chercheurs des équipes du projet d’unité et d’asseoir l’analyse des réseaux de collaborations. Pour en faire la représentation nous avons utilisé l’outil de visualisation Gephi associé à l’algorithme ForceAtlas !! » Youpi, voilà le cœur de l’analyse scientifique : l’Algorithme !

Vous n’y pensiez pas, le DESP lui y a pensé !

A l’heure de la réduction de la dépense publique, les indicateurs avec leurs algorithmes et leurs tableaux Excel peuvent remplacer les CSS et leurs élus pour l’évaluation des unités et des chercheurs. En effet, quoi de plus neutre et objectif en apparence qu’un nombre ?

Cette conception uniquement quantitative technocratique ultra réductrice de l’évaluation par le recours à des critères hautement subjectifs décline une conception utilitariste de la recherche publique : celle d’une recherche essentiellement finalisée. Les chercheurs, leurs laboratoires doivent avant tout répondre à la demande des contrats. Et plus la recherche de financements sera aiguë plus la tyrannie des indicateurs sera prégnante. Il appartient aux scientifiques de desserrer l’étreinte.


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